Alors que certains biens deviennent la propriété exclusive de l’usufruitier selon les dispositions de l’article 587 du Code civil, il y en a d’autres qui doivent faire l’objet d’une restitution après usage, et c’est là qu’intervient la notion de quasi-usufruit expliquée dans l’article.

Qu’est-ce qu’un quasi-usufruit ?

La loi veut que le quasi-usufruit porte uniquement sur les biens consomptibles, c’est-à-dire des choses qui disparaissent après leur usage. Le quasi-usufruitier peut, de ce fait, disposer librement de l’élément sur lequel est basé son droit à condition qu’il soit capable de restituer l’équivalent de ce bien au moment voulu (à la fin du contrat d’usufruit). L’équivalence est ici mesurée en termes de quantité ou de valeur de deux biens de même nature. Ainsi, le quasi-usufruit peut porter sur des fonds disponibles sur un compte bancaire au moment de la signature d’un contrat de démembrement, des marchandises en stock dans un fonds de commerce ou des actifs disponibles dans un portefeuille pour les placements de valeurs mobilières…bref, des actifs sous forme de flux et destinés à être consommés.

Il faut reconnaître que le quasi-usufruit renforce les pouvoirs du quasi-usufruitier dans son droit de se servir de la chose (usus) et d’en percevoir les fruits (fructus), et cela en dépit du fait que pour l’usufruitier, l’obligation de restitution constitue une forme de contrainte. En fait, vis-à-vis du nu-propriétaire, il sera toujours redevable de cet élément consommé. Il en résulte que le titulaire de la nue-propriété n’est pas vraiment titulaire d’un droit réel pendant la durée du démembrement, car il ne dispose que d’une simple créance de restitution dans ce cadre. En plus, en matière d’IFI (impôt sur la fortune immobilière) et conformément à l’arrêt du 24 mai 2016 de la Cour de Cassation, la dette de restitution est considérée comme un élément du passif. Elle est donc exigible au terme de l’usufruit et peut faire l’objet d’une déduction de l’assiette fiscale.

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Les conditions pour la mise en place d’un quasi-usufruit conventionnel

Comme son nom l’indique, le quasi-usufruit conventionnel nécessite l’établissement d’une convention d’accord entre les deux parties contractantes. Il s’agit d’une convention rédigée devant le notaire, c’est-à-dire un acte juridique synallagmatique nécessitant un inventaire préalable ainsi que le dépôt d’un éventuel cautionnement afin d’assurer la garantie de la restitution des biens consommés à l’échéance du contrat de démembrement. En l’absence de ladite convention, l’Administration fiscale est en droit de refuser la déductibilité de la dette liée à la créance de restitution, voire de remettre en cause le contrat de démembrement.

D’ailleurs, cette convention a pour objet principal de fixer les conditions et les modalités de restitution des biens consommés à la fin du contrat ou en cas d’éventuel décès de l’usufruitier. Elle prévoit et organise également les droits et les obligations du quasi-usufruitier et du nu-propriétaire. Le montant de la créance de restitution ainsi que son éventuelle indexation doivent être inscrits dans la convention. Il va sans dire qu’avant d’entrer en jouissance et administrer le bien tel un «bon père de famille», l’usufruitier doit dresser un inventaire des éléments meubles et immeubles constituant le bien. Cette étape est particulièrement cruciale car en tant que quasi-usufruitier, il doit tout mettre en œuvre pour éviter le risque d’insolvabilité.

Dans le cas où un conjoint opte pour l’usufruit ou que le défunt lui a légué ses biens en démembrement, la succession (considérée comme «ab initio») est soumise aux règles du quasi-usufruit. Cela dit, le quasi-usufruit portera non seulement sur le solde des différents comptes courants (dépôt à vue, compte en banque…), mais aussi sur l’intégralité des titres de créances monétaires souscrits au nom du défunt.

Le quasi-usufruit offre ces avantages

L’établissement d’une convention de quasi-usufruit permet de bénéficier de quelques privilèges juridiques non-négligeables. D’abord, si un donateur souhaite tout simplement transmettre la nue-propriété de son bien à une personne physique ou morale, il peut conserver le quasi-usufruit de celui-ci, et ainsi avoir une totale maîtrise de son patrimoine. En parallèle, il pourra procéder à la cession d’une partie non consomptible de son bien étant donné que le quasi-usufruit ne concerne que les biens consomptibles.

Cette pratique est surtout très courante et très plébiscitée dans le domaine des placements en valeurs mobilières. C’est en effet le meilleur moyen de continuer de gérer son portefeuille sans la moindre contrainte. Le quasi-usufruit permet également au nu-propriétaire de bénéficier d’une réelle sécurité juridique au cours du contrat de démembrement.

Justement, outre  les obligations d’inventaire et de cautionnement, il y a aussi cette obligation d’emploi dont l’objet est de garantir, en l’absence de caution, la restitution des éléments consommés à l’extinction de l’usufruit. C’est d’ailleurs pour cette raison que dans la majorité des cas, le quasi-usufruitier doit obtenir l’aval du nu-propriétaire avant l’emploi de la somme ou des biens disponibles. Aussi, au terme de l’article 618 du Code civil, un usufruitier condamné pour abus de jouissance peut être sévèrement sanctionné par le Tribunal de Grande Instance.

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Informations utiles sur le quasi-usufruit

D’abord, il importe de se pencher sur quelques conséquences particulières de l’extinction du quasi-usufruit. Par exemple, si celui-ci s’est exercé sur un support monétaire, le principe du nominalisme monétaire applicable sur un contrat de remboursement de prêt empêche toute réévaluation quelconque, quelle que soit l’évolution du cours de la monnaie en question.

Autrement dit, dans ce cas de figure, la créance de restitution n’échappe pas aux dispositions de l’article 1895 du Code civil qui stipulent que l’obligation résultant d’un prêt en argent se fonde toujours sur la somme numérique indiquée sur le contrat sauf si une autre clause en prévoit autrement. Mais pour le cas des biens consomptibles (autres qu’une somme d’argent) dont la valeur s’est appréciée au cours de la période de démembrement, leur valeur de restitution doit être indexée à la même proportion.

Enfin, dans le cas d’une assurance-vie, le démembrement de la clause bénéficiaire donne au souscripteur le droit d’effectuer des versements sous la forme de quasi-usufruit, ceci afin de protéger les bénéficiaires tels qu’un conjoint survivant par exemple. En plus, par rapport à un contrat classique, le quasi-usufruit en assurance-vie procure un avantage fiscal très attractif sur le long terme.

Sur un contrat de capitalisation, le quasi-usufruit permet d’effectuer une donation à moindre coût à ses enfants tout en conservant la main sur la sécurisation de son bien. C’est d’autant plus vrai quand une personne souscrit un ou plusieurs contrats de capitalisation et qu’elle procède à une donation en nue-propriété avec possibilité de réserve de quasi-usufruit à ses héritiers.