Lorsqu’un bien fait l’objet d’un démembrement immobilier, sa propriété est partagée en deux parties : la nue-propriété et l’usufruit. Le droit de propriété, tel qu’il est défini dans l’article 544 du Code Civil, est ainsi confié à deux entités distinctes.
De fait, le nu-propriétaire et l’usufruitier détiennent des droits sur l’actif immobilier. Dans cette situation, la décision de vendre le bien démembré répond à certaines règles.
Vente en cas de démembrement temporaire
Il y a deux formes de démembrement : viager et temporaire. Le démembrement temporaire se fait généralement ab initio. C’est-à-dire que dès l’acquisition du bien démembré, deux parties se portent acquéreurs respectivement de la nue-propriété et de l’usufruit.
Cet investissement simultané s’opère en vertu d’un contrat spécifique, déterminant dès le départ la durée pendant laquelle s’étend l’état de démembrement.
Dans ce cas de figure, chaque partie a des droits et des devoirs parfaitement définis. L’usufruitier comme le nu-propriétaire peut décider de céder librement ses droits, dans la mesure où l’acheteur respecte la convention de démembrement fixée à l’origine.
Ici, le vendeur n’est donc pas tenu de solliciter l’aval de l’autre propriétaire étant donné que cela n’impacte nullement l’investissement ni les droits de ce dernier.
L’entité cédant ses droits de propriété sur le bien fixe le prix de la vente en accord avec le potentiel acquéreur, comme dans une transaction classique.
Bien démembré en viager : comment est réparti le prix de vente
La situation est autrement plus complexe dans le cas d’un bien démembré en viager puisque les intérêts de l’usufruitier et du nu-propriétaire sont étroitement liés.
Normalement, les deux parties doivent être d’accord pour céder leurs droits respectifs.
La répartition du prix de vente entre nu propriétaire et usufruitier
Lors de la transaction, la répartition du prix de vente entre nu-propriétaire et usufruitier se fait, sauf dispositions contraires, selon l’article 621 du Code Civil :
« En cas de vente simultanée de l’usufruit et de la nue-propriété d’un bien, le prix se répartit entre l’usufruit et la nue-propriété selon la valeur respective de chacun de ces droits, sauf accord des parties pour reporter l’usufruit sur le prix. » [/su_note]
En réalité, cela revient à concrétiser deux ventes distinctes au profit d’un même acheteur. Au préalable, cela induit que le nu-propriétaire et l’usufruitier se sont entendus sur la valeur de la pleine propriété ainsi que la valeur de leurs droits respectifs.
La valeur des droits entre nue propriété et usufruit
Sur ce dernier point, pour des raisons pratiques, c’est généralement le barème légal défini dans l’article 669 du CGI qui est pris en référence pour fixer la répartition des droits. Ce barème varie selon l’âge de l’usufruitier : plus il est âgé, plus la valeur de la nue propriété est conséquente.
Prenons un exemple :
- La vente du bien intervient alors que l’usufruitier est âgé de 75 ans. Dans ce cas, ce dernier récupérera 30 % du produit de la vente, le nu propriétaire bénéficiant des 70 % restants.
- Si l’usufruitier est âgé de moins de 71 ans révolus, la quote-part de l’usufruit s’établit à 40 %. Entre 81 et 90 ans, elle se fixe à 20 %.
Attention : contrairement aux idées reçues, le recours au barème de l’usufruit ne constitue pas une obligation.
Les deux parties peuvent opter pour un autre calcul, en privilégiant une évaluation économique de l’usufruit, basée sur la rentabilité réelle du bien.
Notons qu’il peut y avoir des dérogations au principe de cette double cession simultanée des droits de chacun dans le cas où le nu-propriétaire et l’usufruitier en décident autrement. En effet, les deux parties peuvent prévoir de reporter leurs droits en réinvestissant le produit de la vente dans l’acquisition démembrée d’un nouvel immeuble.
La notion de quasi-usufruit
Le démembrement peut aussi se poursuivre sous une autre forme dès lors que les deux parties en conviennent. Il peut être décidé que l’intégralité du prix de la cession soit remis entre les mains de l’usufruitier. Dans ce schéma, celui-ci récupère alors un quasi-usufruit sur les sommes reçues. Il peut ainsi disposer librement des fonds, les utiliser ou les réinvestir comme il le souhaite. Il lui incombe cependant de rembourser le nu-propriétaire à son décès.
Le nu-propriétaire initial, devenu de fait « quasi-nu-propriétaire», récupère alors une créance à reporter sur le patrimoine qui sera légué par le quasi-usufruitier. Dans ce cas, il faut bien s’assurer que le notaire inscrive cette dette au passif de la succession de l’usufruitier pour que le nu-propriétaire puisse être indemnisé à terme.
Comme dans le cas d’un quasi-usufruit classique, une clause de remploi peut être prévue lors de la cession des droits démembrés au moment de la vente du bien, afin que l’usufruitier réutilise les fonds en accord avec les intérêts des deux parties.
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